
Vidéos du cycle Dérèglement climatique et santé
Selon l'OMS, le changement ou dérèglement climatique « est la plus grande menace pour la santé à laquelle l’humanité est confrontée ». Il pourrait causer près de 250 000 décès supplémentaires par an entre 2030 et 2050, dus à la malnutrition, au paludisme, à la diarrhée et à la chaleur. Les personnes les plus touchées vivent dans des pays à faible revenu. Cependant, il est encore difficile d’estimer avec précision, compte tenu des multiples facteurs en jeu, les impacts de morbidité et de mortalité des différents phénomènes impliqués dans le dérèglement climatique : vagues de chaleur, inondations, tornades et tempêtes, augmentation des infections transmises par l’eau, l’air ou par des animaux vecteurs, perturbation des productions alimentaires, maladies mentales, etc.
Ce cycle de webinaires a fait un état des lieux en vue de constituer un réseau d’échanges d’informations et de compétences sur les conséquences du dérèglement climatique sur la santé humaine et la nécessaire adaptation des systèmes de santé.
Webinaire n°1 - Vendredi 21 avril 2023
Dérèglement climatique et maladies infectieuses
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Quels liens entre le dérèglement climatique et les maladies vectorielles des vertébrés ? Du simple au complexe
Didier Fontenille, IRD, UMR MIVEGEC (Maladies infectieuses et vecteurs : écologie, génétique, évolution et contrôle), Montpellier
Pour qu’une maladie due à un agent infectieux survienne chez un vertébré, un grand nombre de conditions doivent être réunies, concernant l’agent infectieux (par exemple un virus), le vecteur (un moustique, une tique...), l’hôte vertébré (les humains ou les oiseaux). Le dérèglement climatique a des implications, positives ou négatives, sur ces trois compartiments : depuis un climat inadapté à un vecteur (il n’y a pas pour l’heure de moustique au pôle nord), jusqu’à des systèmes vectoriels impliquant des dizaines de variables dépendant du climat. Nous déclinerons quelques exemples de cette complexité en essayant de leur donner un poids relatif, les unes par rapport aux autres, en fonction des contextes environnementaux.
La modélisation de la propagation des épidémies
Eugenio Valdano, IPLESP, équipe SUMO (Surveillance et modélisation des maladies transmissibles), Paris
L'adaptation au dérèglement climatique implique de prévoir systématiquement des urgences combinées dans lesquelles des événements météorologiques extrêmes (inondations, tempêtes, vagues de chaleur) et des épidémies de grande échelle se produisent simultanément. Notre projet est de déterminer quantitativement l'effet du temps extrême sur la circulation des épidémies en étudiant les changements de comportements et de mobilité de la population. L'objectif ultime est d’estimer à haute résolution spatiale le risque combiné de temps extrême et d’épidémie, en suivant une gamme de scénarios climatiques possibles. Pour ce faire, nous utiliserons une modélisation mathématique mécaniste ainsi qu'une analyse statistique de diverses couches de données : des archives climatiques, des données de surveillance passées, des projections de risque d'occurrence de temps extrême et des données de mobilité humaine. Nos résultats aideront à lutter contre les agents pathogènes déjà en circulation (par exemple, le SARS-CoV-2), et contre les agents émergents.
La modélisation des zoonoses à tiques
Raphaëlle Métras, IPLESP, équipe SUMO (Surveillance et modélisation des maladies transmissibles), Paris
Les agents pathogènes (bactéries, virus et parasites) transmis par les tiques ont des cycles de vie complexes à l’interface entre l’humain, les animaux, les tiques et l’environnement. Quantifier les composantes de leur transmission à l'Homme est nécessaire pour mieux évaluer les mesures de surveillance et de contrôle, ou pour anticiper une augmentation de l'incidence des maladies infectieuses ainsi transmises. A l’aide d’exemples, il sera discuté comment la modélisation mathématique permet d’analyser de façon intégrée des jeux de données écologiques et épidémiologiques. De là, il devient possible d'estimer les paramètres clés de l'évolution de ces maladies, notamment le nombre de cas et les populations exposées. Cette évolution peut être projetée selon différents scénarios qui intègrent les changements météorologiques et d'activités en plein air qui pourraient découler du dérèglement climatique.
Webinaire n°2 - Mardi 30 mai 2023
Les vagues et îlots de chaleur et leurs conséquences sanitaires en milieu urbain
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Effets de la température, de l’environnement urbain et des inégalités sociales sur la santé périnatale en France
Johanna Lepeule et Lucie Adelaïde, équipe d’Épidémiologie environnementale appliquée à la reproduction et la santé respiratoire, Institut pour l’avancée des biosciences, Inserm U. 1209, CNRS UMR 5309, Université Grenoble Alpes
En France métropolitaine, le changement climatique est à l’origine d’une augmentation des températures induisant des impacts sanitaires majeurs, avec près de 8 000 morts de 2015 à 2020. L’intensification de la fréquence, de la durée et de l’intensité des vagues de chaleur estivales va se poursuivre d’ici 2050. Les impacts de la chaleur sur la morbidité restent peu étudiés, et plus spécifiquement, les effets de la chaleur sur la santé périnatale. Cet état des connaissances des effets de la température ambiante sur la santé périnatale et des mécanismes physiopathologiques sous-jacents s’intéressera au rôle des co-expositions dans l’environnement urbain et de la défaveur sociale.
Caractérisation des extrêmes chauds en milieu urbain et impacts sanitaires associés
Sandra Rome, Université Grenoble Alpes, Institut des Géosciences de l'Environnement
L’été 2022 a été l’un des plus chauds jamais enregistrés en France, avec une anomalie thermique de +2,8°C ; il représentera un été sur deux d’ici 2080. Dans les villes d’Echirolles et de Grenoble (Isère) étudiées dans le projet CASSANDRE (CAniculeS, SANté et Densité de REseaux météorologiques sur le territoire grenoblois), financé par l’ADEME, l’été 2022 a enregistré trois canicules, auxquelles s’ajoute l’îlot de chaleur urbain. Le cœur d’agglomération a compté 19 nuits tropicales (T° nuit > 20°C) et 13 jours très chauds (T° jour > 35°C). Ces extrêmes thermiques représentent un danger pour les populations les plus vulnérables, d’où l’activation de la « vigilance canicule » à plusieurs reprises au cours de l’été. La suite du projet vise à spatialiser à fine échelle les extrêmes de chaleur et la vulnérabilité socio-spatiale associée, puis d’étudier le lien avec la santé.
Vagues de chaleur, îlots de chaleur urbains, bien-être et santé
Basile Chaix, UMR-S 1136 (Institut Pierre Louis d’Épidémiologie et de Santé Publique, IPLESP)
Les chaleurs extrêmes sont associées à une morbidité et une mortalité accrues. Le projet H3Sensing suivra 200 résidents du Grand Paris pendant quatre jours en mars-mai 2023 puis à nouveau en juin-septembre 2024, au moyen de questionnaires et de capteurs embarqués. Le premier objectif est d’étudier les déterminants liés aux environnements extérieurs (bâtiments, logements, situations et comportements d’exposition personnelle à la chaleur) lors des activités quotidiennes. Le second objectif est d’examiner comment ces déterminants du stress thermique et le stress thermique lui-même sont associés à différents indicateurs de la thermorégulation, au sommeil, à l’inconfort thermique et au bien-être. Dans un partenariat entre épidémiologistes, urbanistes et scientifiques du climat, il s’agira de produire des connaissances utiles pour intervenir sur les bâtiments, environnements et comportements afin d’améliorer la résilience durant les vagues de chaleur.
Webinaire n°3 – Vendredi 30 juin
Le dérèglement climatique augmente-t-il les risques dus à la pollution de l'air ?
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Estimation de l’impact sanitaire de la pollution de l’air à l’échelle globale
Didier Hauglustaine, chercheur, Laboratoire des sciences du climat et de l’environnement (LSCE), Gif-sur-Yvette
L’exposition quotidienne aux polluants de l’air, comme les particules fines ou l’ozone, a des effets néfastes sur la santé tout au long de la vie. Dans le cadre du projet A-C HIA nous avons utilisé les outils de modélisation du climat, de la qualité de l’air et de la santé et comparé différents scénarios d’évolution climatique et de réduction des émissions polluantes pour estimer l’impact sanitaire de la qualité de l’air à l’horizon de 2050. Nous présenterons les résultats de ce projet, les modèles numériques nécessaires à ces travaux et les hypothèses faites sur l’évolution des rejets de polluants dans l’air. Dans un deuxième temps nous actualiserons ces résultats en présentant les travaux les plus récents en termes d’évolution future de la composition chimique atmosphérique en lien avec le changement climatique ainsi que les estimations les plus récentes quant à leur impact sanitaire. Ces résultats montrent que des bénéfices substantiels pour la santé publique pourraient être obtenus dans les prochaines années grâce à des stratégies coordonnées de réduction des émissions de gaz à effet de serre et d’amélioration de la qualité de l’air.
Quels co-bénéfices des stratégies d’atténuation du changement climatique pour la qualité de l’air et les impacts sanitaires associés ?
Augustin Colette, responsable d’Unité, Unité Modélisation atmosphérique et cartographie environnementale, direction Milieux et impacts sur le vivant, Institut national de l’environnement industriel et des risques (Ineris)
La qualité de l’air et le changement climatique sont intimement connectés. Tout d’abord car ce sont souvent les mêmes sources d’activité humaines qui sont responsables des émissions de polluants atmosphérique et de gaz à effet de serre. Les stratégies de décarbonation de l’économie auront donc des effets positifs sur la qualité de l’air, du moins pour une bonne partie d’entre elles. Inversement, certains polluants de l’air contribuent aussi à perturber le climat (tel que le méthane ou le carbone suie). Mais la réduction des émissions de gaz à effet de serre permettra aussi de limiter des effets du changement climatique qui sont délétères pour la qualité de l’air tels que l’impact des vagues de chaleurs sur les pics d’ozone ou sur les feux de forêt, et les panaches de fumée associés. Nous présenterons ces différents effets et comment les outils disponibles permettent de quantifier le bénéfice sanitaire que l’on peut attendre de l’atténuation du changement climatique.
Pollution atmosphérique et changement climatique : scénarios mobilité, aménagement urbain et chauffage pour protéger la santé (Projet PACC-MACS)
Stephan Gabet, maître de conférences en santé publique, Equipe Impact de l’environnement chimique sur la santé humaine (ULR 4483-IMPECS) / UFR3S-Médecine, Université de Lille
Le projet interdisciplinaire PACC-MACS (financement ADEME PRIMEQUAL 2020) vise à identifier et à évaluer des scénarios de politiques publiques de lutte contre la pollution atmosphérique et le changement climatique à l'échelle de la métropole grenobloise. A cette fin, une chaîne de modélisation permettant de connecter modèles climatiques globaux et régionaux, modèles de température et de pollution et méthodes d'évaluation d'impacts sanitaires et économiques est en cours de développement. Les bénéfices attendus à l'horizon 2050 de ces scénarios, ciblant les secteurs de la mobilité, du bâti (émissions résidentielles) et de l’urbanisme (albédo en milieu urbain, végétalisation des villes), pourront être ainsi évalués.