Dérèglement climatique dans les pays du Sud : faire face aux risques croissants pour la santé

Vendredi 13 septembre 2024, 13h30-15h30

Webinaire n°6 du cycle Dérèglement climatique et santé humaine.

Les effets du réchauffement sur la transmission de maladies vectorielles

Benjamin Sultan, directeur de recherche, climatologue, IRD UMR 228 Espace-Dev, Montpellier

Il est établi que les variations de températures et de précipitations peuvent avoir un impact important sur la transmission des maladies vectorielles dans les pays du Sud. A partir d'exemple d'études de modélisation en Afrique et en Asie du Sud Est, nous montrons l'effet du réchauffement climatique sur la distribution spatio-temporelle de la densité vectorielle et la transmission de maladie vectorielle. Les très fortes températures attendues en fin de siècle peuvent privilégier certains types de vecteurs moins sensibles aux hautes températures et renforcer le risque de transmission de maladies vectorielles dans les régions de montagnes et/ou les saisons les plus fraîches qui étaient auparavant moins à risque. A l'inverse, les très hautes températures peuvent limiter la transmission en région de plaine et réduire la densité des moustiques les plus sensibles aux fortes températures à la fin du siècle.

Un impact caché de la chaleur : l'aggravation de l'anémie en Inde

Claire Lepault, chercheure doctorante à l'Ecole d'économie de Paris et au CIRED, Philippe Quirion, directeur de recherche CNRS au CIRED, Pierre Uginet, chercheur doctorant à l'Ecole d'économie de Paris et à HM&Co

Si de nombreux effets nocifs des températures élevées sur la santé ont été établis, très peu de recherches ont été menées sur leur impact possible sur l'anémie, une maladie qui touche un quart de la population mondiale et 43 % de la population indienne. À l'aide de données sanitaires, nutritionnelles et climatiques, nous analysons la relation entre les températures élevées et l'anémie en Inde au cours de la dernière décennie. Nous faisons correspondre le taux d'hémoglobine de près de 259 000 enfants, 901 000 femmes et 138 000 hommes à des vagues de chaleur sèche (températures élevées) et humide (combinaison de températures élevées et d'humidité). Nous constatons que l'exposition à des températures élevées dans les 30 jours précédant la prise de sang aggrave l'anémie dans ces trois catégories. De plus, les mécanismes responsables ne semblent pas être liés à une réduction de la disponibilité alimentaire, mais le paludisme pourrait expliquer une petite partie de la relation entre la température et l'anémie.

Pourquoi doit-on en finir avec l’idée d’acclimatation des Africains à la chaleur ?

Richard Lalou, démographe, chercheur à l'IRD, Paris, Daouda A. Diene et Abdoulaye Guindo

Les recherches convergent pour reconnaître que la mortalité associée à la chaleur pourrait devenir un problème de santé publique dans les régions au climat chaud (entre 15°S et 15°N). Le GIEC (2018) convient que l’Afrique subsaharienne connaîtra une augmentation des températures supérieure à la moyenne mondiale, avec une hausse des nuits chaudes, ainsi que des vagues de chaleur plus longues et plus fréquentes. Bien que plus rares, les preuves épidémiologiques montrent qu’en Afrique l’association entre l’exposition à la chaleur extrême et la santé est très souvent positive, complexe et variable selon les contextes géoclimatiques et socioéconomiques. Nous considérerons, sur la base de données chronologiques, la relation entre la chaleur extrême, la pollution de l’air et la santé, à la fois dans un milieu rural sénégalais d’arrière-pays, et dans une métropole béninoise sur le littoral. Ces preuves nous conduiront à remettre partiellement en cause le concept et l’usage de l’acclimatation à la chaleur.