Résilience du service de pollinisation en milieux urbains

 

Doctorant : Arthur FAUVIAU (2020-2023)

Les effets de l'urbanisation sur les pollinisateurs

Aujourd’hui, les villes sont en expansion (United Nations, 2019), et les impacts de l’urbanisation sur la biodiversité sont bien connus. Concernant les insectes pollinisateurs, une controverse existe dans la littérature. Si certains auteurs ont montré un effet négatif de l’urbanisation (Geslin et al., 2016 ; Hamblin et al., 2018) sur les insectes pollinisateurs, d’autres en documentent une richesse et une abondance non-négligeable (Fortel et al., 2014 ; Baldock et al., 2015).
L’objectif de ma thèse, qui s’inscrit dans cette controverse, est d’évaluer les relations entre communautés de pollinisateurs, fonction de pollinisation et urbanisation.

Dans un premier temps, j’effectue une méta-analyse à partir de bases de données regroupant les inventaires d’abeilles sauvages effectués en France, mais également en Belgique et en Suisse (Figure 1). Ces inventaires proviennent de différents milieux (urbains, agricoles, semi-naturels…), permettant une comparaison taxonomique et fonctionnelle des communautés d’abeilles sauvages, entre milieux urbains et non-urbains. L’objectif est d’identifier de potentiels filtres des milieux urbains sur les communautés d’abeilles sauvages. Ces filtres sont mis en évidence dans les résultats, notamment sur les traits des abeilles sauvages, certains d’entre eux étant plus abondants en ville que dans d’autres milieux. Un article est actuellement en préparation sur ce travail.

Le second objectif de ma thèse est de comparer les communautés d’abeilles sauvages urbaines selon certaines caractéristiques de ces milieux. Notamment, la quantité, la taille et la connectivité des espaces verts urbains seront analysés. En effet, les espaces verts urbains permettent l’apport de ressources alimentaires mais également de nidification pour les abeilles sauvages, les rendant très importants pour le support de la biodiversité en villes.

Points d’échantillonnage d’abeilles sauvages de la méta-analyse (à gauche)

Carte des participants (2021) au protocole pollinomètres (à droite)

Des pollinomètres

La deuxième partie de ma thèse s’appuie sur une expérience de terrain, déjà effectuée en 2021 et répétée en 2022. Dans une quinzaine de villes de France, Belgique et Suisse (Figure 2), l’objectif est d’y estimer la fonction de pollinisation. Pour cela, nous utilisons une plante dite « pollinomètre » (qui mesure la pollinisation) : la moutarde blanche, Sinapis alba.

Dans chaque ville, les plantes sont exposées aux pollinisateurs dans minimum 5 espaces verts urbains. Durant une heure, le nombre de visites sur les plantes est reporté, ainsi que leur diversité au morphogroupe (abeille sauvage ou domestique, syrphe, coléoptère, lépidoptère, etc...). Cela permet une estimation de l'intensité de la fonction de pollinisation en milieux urbains. Environ un mois après le terrain (le temps de la fructification), nous pouvons estimer le pourcentage de fleurs donnant des fruits, ainsi que le nombre de graines moyen par fruit. Cela nous permet d’estimer l’efficacité du service de pollinisation en milieux urbains. Cette expérience est répliquée 3 fois dans l’année : en début, milieu et fin de saison de pollinisation.
Ensuite, l’efficacité et l’intensité du service de pollinisation sont comparées entre villes sur la base des mêmes variables qu’évoquées précédemment : la quantité, la taille et la connectivité des espaces verts urbains. Cela permettra de déterminer les facteurs principaux des espaces verts urbains agissant sur la fonction de pollinisation.

Dans sa globalité, cette thèse permettra de déterminer comment le milieu urbain conditionne les communautés d’abeilles sauvages, ainsi que sa relation avec la fonction de pollinisation. Cela permettra de peut-être donner des pistes quant à la gestion des villes et des espaces verts pour rendre ces milieux les plus hospitaliers possibles pour les pollinisateurs.

Fauviau A., 2021. Pollinometers experiment: first results and prospects. Communication Orale. Présentée au colloque du GDR “Pollinéco” à Toulouse, France
Fauviau A., 2021. Pollinometers and the city: a collaborative experiment to measure pollination function in a range of western European cities. Poster. Présenté aux Journées Scientifiques de l’iEES, à Paris, France.
Fauviau A., 2021. Pollinometers and the city: a collaborative experiment to measure pollination function in a range of western European cities. Poster. Présenté au colloque du Ecology Accross Borders (BES-SFE²) en ligne.

Baldock, K. C. R. et al. Where is the UK’s pollinator biodiversity? The importance of urban areas for flower-visiting insects. Proc. R. Soc. B. 282, 20142849 (2015).

Fortel, L. et al. Decreasing Abundance, Increasing Diversity and Changing Structure of the Wild Bee Community (Hymenoptera: Anthophila) along an Urbanization Gradient. PLoS ONE 9, e104679 (2014)

Geslin, B. et al. The proportion of impervious surfaces at the landscape scale structures wild bee assemblages in a densely populated region. Ecol Evol 6, 6599–6615 (2016)

Hall, D. M. et al. The city as a refuge for insect pollinators: Insect Pollinators. Conservation Biology 31, 24–29 (2017)

Hamblin, A. L., Youngsteadt, E. & Frank, S. D. Wild bee abundance declines with urban warming, regardless of floral density. Urban Ecosyst 21, 419–428 (2018).

United Nations, Department of Economic and Social Affairs, & Population Division. World urbanization prospects: 2018 : highlights. (2019).

Isabelle DAJOZ*-**

et Mickaël HENRY***

* UMR 7618, iEES Paris – Sorbonne Université – 4 place Jussieu, 75005 Paris

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